Un collectif de personnalités de gauche appelle François Hollande à débloquer les négociations entre l’Eurogroupe et les autorités grecques.
La crise grecque s’exacerbe de façon alarmante. Chaque jour qui passe
peut, soit nous rapprocher d’un accord utile à toute l’Europe, soit
d’une rupture dont personne ne peut prévoir les conséquences.
L’intransigeance des principaux dirigeants européens peut nous conduire
alors au bord de l’abîme. Il est aussi vital que pressant de sortir de
ce piège. Le moment est crucial.
La responsabilité de chaque acteur concerné est directement engagée.
Il serait sordide – et, au demeurant, parfaitement vain – d’escompter
une capitulation du gouvernement grec. La fidélité de celui-ci au mandat
que lui a confié son peuple n’est pas un défaut mais un exemple
à suivre. S’il refuse la compromission, il s’est, en revanche, montré
prêt au compromis. Une solution à la fois digne et réaliste est donc
à portée de la main. Le moment ultime est venu pour la concrétiser.
C’est dans ce contexte que nous vous lançons, monsieur le président
de la République, un appel solennel : la France ne peut, dans un tel
moment, apparaître inerte sinon suiviste des puissants. Son message ne
peut se réduire à un rappel docile des «règles» à respecter quand la
maison brûle. D’autant que ces règles sont aujourd’hui massivement
récusées par les peuples, et reconnues contre-productives par nombre de
leurs anciens protagonistes eux-mêmes.
Aujourd’hui, alors que la crise de confiance entre les citoyens et
les institutions européennes est à son comble, c’est en se montrant
capable d’entendre l’exigence de justice, de dignité et de souveraineté
d’un peuple debout, qu’un pays comme le nôtre sert la cause européenne
bien comprise. A l’inverse, qui humilie la Grèce obère l’avenir de la
construction européenne. Car le refus de l’austérité et l’aspiration
démocratique sont en Europe les attentes les plus partagées.
C’est pourquoi nous attendons de vous, que vous preniez une
initiative politique de nature à débloquer les négociations entre
l’Eurogroupe et les autorités grecques. Nous n’évoquerons pas ici les
transformations profondes à promouvoir en Europe qui font débat entre
nous. L’acte urgent que nous vous demandons d’accomplir est de refuser
de participer à la stratégie d’isolement de la Grèce, concernant en
particulier le chantage financier et la nature des «réformes» exigées du
gouvernement et du Parlement de ce pays.
Apportez un soutien explicite aux mesures saines prises par les
autorités grecques, telles que celles qui s’attaquent à la crise
humanitaire en Grèce, ou qui permettent enfin de lutter contre l’évasion
fiscale.
Désolidarisez-vous, en revanche, nettement des exigences
insoutenables de l’Eurogroupe en matière de dérégulation du marché du
travail, de révision du système des retraites ou de privatisations.
Acceptez, enfin, le principe d’une renégociation de la dette grecque, dont une large part est notoirement illégitime.
Cette situation est sans précédent dans l’Union européenne. La France
doit prendre la place qui est la sienne dans l’histoire, celle-ci est
aux côtés du peuple grec et de son gouvernement.
Parmi les signataires :
Pierre Laurent secrétaire national du PCF, président du PGE,
Pouria Amirshahi député PS, Clémentine Autain porte-parole d’Ensemble,
Marie Noëlle Lienemann députée PS, Emmanuel Maurel, député PS, Guillaume
Balas député européen PS, Marie-George Buffet députée GDR, André
Chassaigne président du groupe GDR, Jean-Pierre Dubois militant
associatif, Hervé Falciani lanceur d’alerte, Liêm Hoang Ngoc socialiste
affligé, Emmanuel Maurel député européen PS, Gus Massiah mouvement
social, Jean-Luc Mélenchon député européen GUE-NGL, Jean-Luc Laurent
président du MRC, maire du Kremlin-Bicêtre, Isabelle Attard et Pierre
Larrouturou Nouvelle donne, Aurélie Trouvé militante
associative, Julien Bayou et Sandrine Rousseau (porte-parole d'EELV),
Eva Joly, députée europénne EELV, Pierre Khalfa (Fondation Copernic)…
Tribune parue dans Libération, le 18 juin 2015.
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