Avec
le projet de loi sur les réseaux de santé, qui seraient montés par les
complémentaires santés (mutualistes ou assurances), le gouvernement et
les députés socialistes s’apprêtent à officialiser l’inégalité par
l’argent face à la maladie.
Le
texte du projet de loi en cours de débat et voté en première lecture à
l’Assemblée nationale permettrait aux complémentaires de passer des
conventions avec des médecins ou des professionnels de santé et au nom
de ce conventionnement « instaurer des différences dans le niveau des prestations ».
Actuellement ces modulations sont prévues dans l’article L112-1 du code
de la mutualité et ne sont possibles qu’en fonction des cotisations
versées ou de la situation de famille.
L’argument
avancé est que cela permettrait de mieux rembourser les malades qui
iraient voir un professionnel ayant passé convention.
Derrière les conventions
Ce
que l’on ne dit pas, c’est que cela permettra aussi de moins rembourser
si le malade choisit un professionnel qui n’est pas conventionné par sa
complémentaire ! De la même manière que la Sécu avec le médecin
référent.
Ce
que l’on ne dit pas non plus, c’est que si cela peut permettre de mieux
prendre en charge les dépassements d’honoraires, cela vient légitimer
le fait qu’il y a une partie toujours plus grande des soins non pris en
charge par la Sécurité sociale.
Cela aboutit à une sorte de super ticket modérateur d’un montant variable en fonction du niveau des dépassements.
Ce
que l’on ne dit pas, c’est que les complémentaires santé n’étant pas
des sociétés de bienfaisance, de toute façon cela se retrouvera dans les
tarifs des complémentaires aggravant l’écart entre ceux qui peuvent
payer une mutuelle ou une assurance et ceux qui ne peuvent pas.
Ce
que l’on ne dit pas non plus, c’est que les complémentaires pour éviter
d’avoir trop à rembourser et/ou pour assurer les dividendes des
actionnaires, chercheront inéluctablement à « contrôler » l’activité des
professionnels dans le sens de la limitation.
Le texte prévoit qu’il ne pourrait pas y avoir de « stipulations tarifaires » relatives aux actes.
Mais
déjà on peut imaginer qu’une certaine pression s’exercera sur le
médecin « conventionné » qui prescrirait trop de médicaments ou
d’examens complémentaires.
Il ne s’agit évidemment pas de se prononcer pour une « consommation de soins » sans limites et inapproprié.
Mais il s’agit de pointer là, que ce que la régulation uniquement financière risque d’introduire est inacceptable.
Le
flou général des conditions de conventionnement entre les
professionnels et les complémentaires permet d’ailleurs déjà de
l’envisager. En effet le texte dit :
« 2°
L’adhésion aux conventions des professionnels, établissements et
services de santé s’effectue sur la base de critères objectifs,
transparents et non discriminatoires ». Cela laisse la porte ouverte à de nombreuses interprétations.
En
dernière analyse, ce sont les principes de base de la Sécurité sociale
d’origine qui sont mis en cause encore une fois et qui reculeraient
encore plus.
Ce
serait un pas supplémentaire vers une protection sociale santé
individualisée, payée de la poche de chacun et non mutualisée,
permettant ainsi de justifier de nouvelles exonérations de cotisations
patronales.
Le
programme que nous défendons, la perspective qu’il faut tracer, c’est
celle d’une reconquête de la Sécurité sociale. Pour une prise en charge à
100% par la Sécu, solidaire et universelle. Un financement basé sur la
cotisation sociale et le salaire socialisé. Et pour le soin le
développement d’un vaste réseau de centres de santé pluridisciplinaires,
publiques de proximité.
Bertrand Foret