Treize jours après la mise à la rue de plus de 350 personnes à Clermont-Ferrand, alors que le tribunal administratif a ordonné samedi 7 à la préfecture le relogement sous trois jours des familles avec enfants, les pouvoirs publics n’ont proposé que quelques « solutions » dont certaines sont des plus précaires et indignes.
Mercredi 11 la préfecture a donné oralement l’assurance que tout le monde aurait un relogement dans les semaines qui viennent, que ce serait dans des lieux décents et, qu’en attendant tous ceux/celles qui n’ont pas de relogement seraient hébergés dans un gymnase.
Néanmoins il reste encore plusieurs problèmes : la décence des hébergements proposés tout d’abord ; ensuite un certain nombre de familles sont relogées dans des hôtels, or c’est précisément cette solution qui a abouti à leur mise à la rue, faute de subventions. Enfin de nombreux sans-abris vont devoir passer plusieurs nuits au gymnase, sous la garde de la Croix-Rouge, en attendant leur relogement.
Jeudi soir la situation s’est tendue. La police a barré l’entrée et la sortie du gymnase. Les gens qui étaient à l’intérieur n’avaient plus le droit de sortir et ceux qui arrivaient étaient acceptés au compte-goutte après de longues discussions ! Les militants qui avaient pu jusque-là entrer ont été refoulés.
Les enfants n’ont pas pu se rendre à l’école ce vendredi 13. Vers 16 heures, une quinzaine de cars de CRS est intervenue place de Jaude, pour déloger des militants qui avaient maintenu le campement devant l’église des Minimes après le départ des sans-logis, alors même que la préfecture était prévenue. Une militante a été interpellée et des camarades – dont GA – ont été « secoués ».
La délégation reçue par le directeur de cabinet à 18h30 a exigé la libération immédiate de la camarade interpellée et a signifié au directeur de cabinet, qu’étant donné la situation il n’était pas possible de tenir une réunion de travail sur l’hébergement dans ces conditions.
Comment en est-on arrivé là… à une situation gérée « comme une catastrophe naturelle » ?
Me Borie, l'avocat qui s’occupe d’un certain nombre de familles a estimé que ce dossier était géré par l'État « comme une catastrophe naturelle avec la Croix rouge dans un gymnase, comme s'il y avait eu une avalanche, alors que cette situation était prévisible. L'État n'a pas su anticiper une situation de crise qu'il connaissait », a-t-il ajouté. Cette situation n’est en effet pas nouvelle. L’Anef avait prévenu l'État ; et la cessation de paiement ne pouvait qu’arriver puisque celui-ci ne remboursait plus que… 5% du montant des factures d’hôtels depuis plusieurs mois. Dans une ordonnance du Conseil d'État de février 2012 il est écrit qu'il « appartient aux autorités de l'État de mettre en œuvre le droit à l'hébergement d'urgence reconnu par la loi à toute personne sans abri » et « qu'une carence caractérisée dans l'accomplissement de cette tâche peut (...) faire apparaître (...) une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale ». Le principe de continuité du droit à l'hébergement d'urgence doit être respecté.
Les personnes qui ont dû quitter les hôtels où elles étaient logées, ont été contraintes de la faire « uniquement du fait de la carence de l'État à dégager un budget conséquent ». Depuis plusieurs années en France a été créée une situation d’engorgement des structures d’accueil, conséquence directe des politiques de restriction en matière d’accueil et d’intégration des immigrés menées tant par la droite, que par le ministère de Manuel Vals ; mais aussi conséquence des mesures de restrictions budgétaires drastiques qui touchent les plus faibles de plein fouet. Ainsi a-t-on pu lire dans Libération du 18 février 2013 qu’en février 2013, seulement 51% des demandes en hébergement d’urgence n’ont pas été satisfaites.
La principale raison de ces réponses négatives reste l’absence de places disponibles suffisantes. 70% des familles qui ont sollicité un logement sont originaires d’un pays n’appartenant pas à l’UE. En un an, les demandes émanant de ces familles ont doublé…
Avalanche de malheurs et de misère.
Dans leur lettre ouverte intitulée LA HONTE (à télécharger ici), « les sans-logis, militants et citoyens solidaires, occupants de la place de Jaude » s’adressent ainsi « aux élus et gouvernants de la République » :
« Comprenez, élus et gouvernants, que parmi les sans-logis qui occupent depuis une semaine la place de Jaude, la plupart sont étrangers, et attendent, souvent depuis de nombreuses années, la reconnaissance de leur situation de réfugiés, et/ou un titre de séjour autorisant à travailler. Ne croyez pas qu'ils ont quitté leur pays, leur famille et leur vie d'avant pour recueillir des allocations familiales au pays des droits de l'homme. Ils ont fui leur pays, la misère, la guerre ou les persécutions, se sont ruinés en payant des passeurs capables de les amener sur ces terres françaises dont la devise, au fronton des édifices publics, proclame Liberté, Égalité, Fraternité. »
Est-il besoin de plus d’explications et d’analyses ?
Enfin, mesurons l’ironie et la cruauté de la situation. Ce samedi 14 septembre est prévue de longue date, sur la Place de Jaude à Clermont-Ferrand, une « Fête de l'Égalité et de la Diversité » organisée par la municipalité PS. Il y aura un « village associatif ». Il était donc urgent pour certains que le campement des « sans », sans-abri et sans-papiers disparaisse…
Bel exemple d'Égalité et de Diversité !
Un rassemblement aura lieu ce samedi 14 septembre Place de Jaude pour fêter l'Égalité et la Diversité …
Heureusement la Solidarité, est plus forte que jamais dans les rangs des militants et d’une partie de la population. Une première victoire a été remportée devant le tribunal puisque promesse a été faite de donner un toit aux familles avec enfants.
La lutte continue en ce moment même auprès des sans-abri, et sur la place publique demain ; lutte menée de front par des syndicalistes, militants associatifs, membres de partis politiques ou simples citoyens indignés.
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